|
| [Général] VOX | |
| | Auteur | Message |
---|
PéZède Démoni N00b
Nombre de messages : 166 Statut : Membre Mini-Lordien Date d'inscription : 21/06/2005
| Sujet: [Général] VOX Mar 21 Juin à 12:14 | |
| VOX
L'accident [Prologue]
Il faisait nuit quand le jeune homme sortit enfin de chez l’ophtalmologiste. Il plaça ses nouvelles lunettes sur son nez et après un clignement des yeux, pour s’habituer à la nouvelle dimension qui venait de s’offrir à lui, les détails que sa mauvaise vue ne lui permettait pas de percevoir devinrent soudain aussi clairs que de l’eau fraîche et pure coulant d’une fontaine de marbre. Par ici, il voyait distinctement le vol des oiseaux migrateurs qui s’envolaient avant que la saison froide ne commence. Par-là, un petit garçon au jeans troué s’amusait avec des petits dés blancs. Heureux de pouvoir enfin contempler le monde à sa juste valeur, le jeune homme prit le chemin de sa maison. Les rues se succédèrent, plus riches en détails les unes que les autres. Haut dans le ciel, le soleil brillait d’une vive lumière, dardant ses rayons sur la petite ville de C***. Les oiseux chantaient leur dernier refrain avant de s’envoler vers un climat plus accueillant. Les voitures roulaient bon train en laissant derrière elles un parfum âcre d’huile de vidange. Les feuilles des arbres bordant les rues remuaient dans un faible bruissement au gré des vents. Les visages des passants semblaient heureux de cette nouvelle journée du mois de novembre, profitant de leur dernier jour de soleil avant que l’hiver et le froid ne viennent reprendre leur droit. Tous semblaient respirer l’air vivifiant qui donnait à cette journée une sensation de paix et d’harmonie. Il passa devant des devantures de magasins, jetant à peine un coup d’œil aux articles proposés par les commerçants. Il passa par la rue principale puis s’engagea dans une étroite ruelle où se construisait un nouveau théâtre. Les échelles et les échafaudages se croisaient et se décroisaient dans un inextricable labyrinthe. Là-haut, les maçons suspendus au-dessus du sol perçaient ou colmataient les murs de l’ancien bâtiment selon les besoins qu’exigeaient sa rénovation et sa reconversion en salle de spectacle. Il leva les yeux quelques instants pour admirer pour la première fois avec netteté le majestueux immeuble. Déjà on pouvait facilement deviner le génie de l’architecte qui avait constitué les plans de mise en place du projet. Les colonnes de pierre se dressaient avec majesté au-dessus des têtes, les reproductions de gargouilles et de peintures contemporaines se mêlaient avec grâce, sur les lourds battants de la porte en bois vernis quelques sculpteurs talentueux gravaient des dessins hiéroglyphiques sur une frise chronologique retraçant la vie du pharaon Ramsès le Grand. Il eut une bouffée de fierté envers son père dont les documents historiques avaient en grande partie inspiré le chef d’œuvre qui était lentement en train de se former sous ses yeux émerveillés par tant de détails et de finesses. Comment ne pas envier son père, un archéologue de renom, qui avait su traduire par son savoir des rites et des coutumes incas, les écrits de cette civilisation disparue ? Son fils par contre, un fainéant de première, ne pensait qu’à se divertir en jouant à sa console de jeu ou en allant rejoindre ses amis au parc de skate. Malgré tous ses efforts pour se concentrer en classe, il ne parvenait pas à empêcher son esprit de vagabonder dans les couloirs de l’imagination. Ses notes étaient plus ou moins correctes mais un laissez aller de plus en plus important entravait la pleine réalisation de son potentiel. En effet, de nos jours, comment empêcher un adolescent de faire ce dont il a envie sans le froisser ou se le mettre à dos jusqu’à ce qu’il soit à cours d’argent de poche ? Ainsi en était-il de sa vie avec ses hauts et ses bas, ses joies et ses malheurs, ses amis et ses ennemis, les filles à séduire avant de se prendre un râteau, les secrets, les sentiments emmêlés dans les questions qu’apporte l’adolescence, les souvenirs de l’enfance qui s’effritent avec l’âge. Il fut soudain tiré de sa rêverie quand une voix retentit derrière lui : « Excuse-moi, tu n’as pas l’heure par hasard ? » Se retournant à demi, il opina vaguement du chef avant de plonger machinalement la main dans la poche de son pantalon pour en sortir son téléphone portable qui ne le quittait jamais. « Il est… ?! » A peine avait-il sorti son téléphone que l’individu qui l’avait interpellé s’en saisit et partit en courant. Surpris par la tournure que venait de prendre la situation, il resta planté là, la main vide serrant encore avec ses doigts l’endroit où aurait dû se trouver son portable. Puis, reprenant ses esprits et son aptitude à marcher, il s’élança à la poursuite du voleur. Il traversa les rues et les ruelles plus vite qu’il ne s'en saurait cru capable à la suite du fugitif. Brusquement l’homme tourna dans une petite ruelle, il le suivit et sentit que petit à petit il gagnait du terrain. Un seul problème se posait : comment allait-il persuader le voleur de lui rendre son portable ? Serait-il agressé avec un couteau caché sous le pull rapiécé ? Enfin il déboucha dans la grande rue, il s’arrêta perplexe et regarda tout autour de lui dans l’espoir d’apercevoir la tête de l’homme dans la foule qui passait et repassait sous ses yeux. Alors qu’il allait abandonner la poursuite, il aperçut le voleur qui tournait à l’angle d’une rue adjacente. Il se remit à courir dans sa direction. Il arriva dans la petite ruelle et l’homme surpris de retrouver son poursuivant se remit à courir à travers les rues. Mais malgré tous les efforts du voleur pour le semer, le terrain qui les séparait ne cesser de diminuer. Soudain, au moment où il tendait la main pour attraper le pull du voleur, il entendit un grand crissement de pneus et le klaxon d’une voiture. Il tourna la tête mais tout ce qu’il parvint à voir fut deux lumières jaune-orangées qui fonçaient droit sur lui. Puis un douloureux éclair sembla zébrer les verres de ses lunettes et ce fut le néant…
Dernière édition par le Mar 21 Juin à 12:19, édité 2 fois | |
| | | PéZède Démoni N00b
Nombre de messages : 166 Statut : Membre Mini-Lordien Date d'inscription : 21/06/2005
| Sujet: Re: [Général] VOX Mar 21 Juin à 12:16 | |
| Chapitre 1 : Portrait de famille
Harry releva un peu plus son col pour se protéger du vent froid et mordant qui sévissait sur sa petite ville. Les mains gantées enfoncées dans ses poches, il grelottait de froid. Il plissa son nez fin et droit pour remettre ses lunettes en face de ses yeux marrons. Il venait d’avoir quinze ans et déjà il mesurait un mètre quatre-vingts. Sa taille lui valait les moqueries de ses camarades de classe et la grosse touffe qu’il avait sur la tête accentuait encore plus sa grandeur démesurée. Depuis son accident, quelques mois plus tôt, son instabilité mentale le rendait imprévisible et toutes les semaines il devait rendre visite à un psychiatre pour vérifier ses aptitudes mentales. Heureusement, son père ne l’empêchait pas de sortir et aucun incident n’avait eut lieu. Il marchait donc sous la pluie hivernale. Il tourna à l’angle d’une rue pour se retrouver devant le théâtre flambant neuf qui venait tout juste d’ouvrir ses portes. Sans les échafaudages, le bâtiment revêtait une toute autre majesté. Les lignes gracieuses se croisaient sans interruption. La fresque murale était totalement achevée, les gargouilles de pierre semblaient surveiller les lieux dans les ténèbres environnantes. Non seulement la salle de spectacle était éclatante à l’extérieur mais à l’intérieur n’en était pas moins : par les fenêtres brillaient des lustres luxueux aux mille et une lumières, le sol dallé reflétait comme un miroir l’image des visiteurs, la scène aux lourds rideaux rouges offrait une visibilité parfaite à tous, les fauteuils rouges rembourrés… Le garçon, leva soudain les yeux vers le ciel. Là-haut, une étrange forme blanche venait de se former parmi les nuages gris et menaçants. Mais elle disparut aussi vite qu’elle était apparue. Frissonnant de froid, Harry préféra continuer son chemin pour rentrer à la maison. Toute fois, une question persistait dans son esprit : Quel était cette étrange forme qu’il avait aperçue dans le ciel nuageux ? Un nuage ? Un avion ? Peut être… Son père était archéologue et par conséquent son fils avait hérité d’une logique implacable qui ne laissait nulle place au fantastique ou à l’étrange et encore moins à l’inexplicable. Après avoir tourné à plusieurs angles de rue, le garçon se retrouva devant une villa aux dimensions généreuses. Il inséra la clé du portail qui coulissa en grinçant. A tâtons, il chercha la petite serrure de la porte d’entrée. Soudain, un éclair zébra le ciel. Il sursauta. De grosses gouttes de sueurs perlèrent sur son front malgré le grand froid. Les mains tremblotantes il introduisit la clé dans la serrure et ouvrit violemment la porte avant de la refermer sur lui. L’éclair. Depuis son accident, les éclairs le mettaient dans tous ses états. Le cœur battant, il s’assit sur une chaise et ferma les yeux, ses lunettes glissant sur son nez. Il s’assoupit un moment. Il était assis dans la grande salle de séjour bien garnie. Le sol était recouvert d’une épaisse moquette beige. A gauche du fauteuil du jeune garçon, dans un coin de la pièce, se trouvait le bureau de son père composé d’une grande table hexagonale incrustée d’une mappemonde recouverte par une vitre de fine épaisseur. Il y avait aussi une chaise noire à roulette qui servait au père de Harry pour ses longues heures d’études d’écritures anciennes. Etalés sur tout le bureau : des notes, des frises chronologiques, un agenda et plusieurs statuettes dont la principale n’était autre que celle de l’ancien dieu indien, Shiva avec ses yeux incrustés de pierres semi-précieuses, les quatre bras levés de la divinité tenant dans chacune des ses mains une lance au bout pointue. Sa bouche semblait exprimer une telle colère qu’il était aisé d’imaginer le cri de guerre qu’aurait lancé le dieu s’il avait été vivant. Juste à côté du bureau, se trouvait une bibliothèque remplie de livres scientifiques, écologiques mais surtout archéologiques, tous classés par catégories et par ordre alphabétique d’auteur. Près de la bibliothèque, une armurerie étroite avec des étagères peintes en marron sombre avec des motifs en spirales dorées sur lesquelles se trouvait des maquettes de bateaux que son père collectionnait. A côté, était accroché au mur un petit tapis d’environ un mètre sur un mètre sur lequel on avait représenté un tigre noir et blanc. Il était un peu déchiré sur les côtés, on y voyait des fils ressortir en lambeaux. Mais la famille de Harry le gardait précieusement car c’était un vieux tapis qui leur avait été offert par un proche. Au centre de la pièce, se tenait une grande table basse carrée en verre. Posés sur la table, un vase avec des tulipes synthétiques et trois cendriers en marbre dans lesquelles s’échappait encore la fumée de mégots de cigarette contrastaient fort avec le décor du reste de la pièce. Tout autour de la table basse, on avait placé un canapé ainsi que trois chaises et un fauteuil en cuir vert pour les grandes occasions. A droite, la cheminée de marbre chauffait la pièce à une température très agréable. Quelques photos de famille étaient posées dessus pour agrémenter le tout. Mais la pièce respirait aussi un air de voyages et de rêves : des masques tribaux accrochés aux murs, des tableaux, des sculptures… Dans la salle d’à coté, se trouvait un ordinateur en mode de veille. Sur l’écran apparaissaient les mots : Larry Covert et Cie. Industrie. De l’autre côté de la pièce, derrière un grand divan, un magnétoscope et un lecteur DVD, le tout accompagné par un téléviseur grand écran qui ressemblait à un miroir et dans lequel on pouvait apercevoir le reflet d’une toile, juste au-dessus de l’ordinateur. Elle représentait un village africain composé de cases, de huttes et d’une rivière. Les murs étaient tapissés d’un papier peint représentant une île paradisiaque et de longues bandes de figures géométriques sur chaque coin des murs. Dans le couloir, fixé par un clou et une ficelle, une magnifique photo d’un coucher de soleil prise sur la grande muraille de chine quelques années auparavant. Un peu plus sur la gauche, dans un cadre de bois une grande photo de famille montrait Harry, sa mère et sa sœur au bord de la plage. Son père n’y figurait pas car il avait très peu de temps libre entre ses voyages d’affaires et ses recherches archéologiques. Juste au bout du couloir, un escalier en bois donnait sur le premier étage. Harry qui c’était assoupi se réveilla en sursaut. Bizarre, rien d’inquiétant ne semblait être arrivé… Il décida qu’il ferait mieux de monter dans sa chambre pour remettre un peu d’ordre dans ses idées. Le jeune garçon monta au premier étage pour aller jouer à sa console de jeux. La maison était calme, il n’y avait aucun bruit. Harry se retrouvait encore tout seul car sa mère et sa sœur étaient sûrement allées rendre visite à sa grand-mère. Un papier accroché sur la porte de la chambre de ses parents lui indiqua qu’il avait vu juste. Il le lut rapidement et le laissa accroché sur la porte. Sa mère et sa sœur ne rentreraient pas avant longtemps. Cela faisait trois heures qu’il était enfermé dans sa chambre, il regarda sa montre, il était presque six heures du soir. Comme son ventre criait famine, il décida d’aller manger. Il se fit un sandwich au beurre et au chocolat et retourna immédiatement dans sa chambre. Son film préféré allait commencer. Il s’installa confortablement sur le lit. Ses paupières se firent soudain lourdes et il s’endormit presque immédiatement. Quand sa mère rentra, elle retrouva allongé sur le lit, la télé allumée. Elle secoua la tête et éteignit le poste de télévision puis sortit sans faire de bruit. | |
| | | PéZède Démoni N00b
Nombre de messages : 166 Statut : Membre Mini-Lordien Date d'inscription : 21/06/2005
| Sujet: Re: [Général] VOX Mar 21 Juin à 12:16 | |
| Chapitre 2 : Visions de l'autre monde
Plus tard dans la nuit, Harry toujours plongé dans un profond sommeil entendit une étrange voix l’appeler : « Harry ! Harry ! Harry… » Le garçon se réveilla à moitié grommela machinalement un « Ouais, j’arrive… » Pourtant, on ne lui répondit pas. D’habitude, sa mère le forçait à se lever dès qu’elle l’appelait. Mais cette fois-ci elle ne lui répondit pas le « Dépêche-toi ! » habituel. Il se leva, intrigué et regarda son réveil : trois heures du matin ! Il avait certainement rêvé… Pourtant, il lui semblait connaître cette voix qui l’appelait. Ce n’était pas celle de sa mère mais elle lui semblait familière. Il l’avait déjà entendu quelque part, mais où ? Il sortit de sa chambre pour aller aux toilettes, il avait les paupières lourdes. En essayant de distinguer quelque chose dans l’obscurité, il aperçu une forme blanche à l’autre bout du couloir. Surpris, il recula d’un pas et clignota des yeux mais la forme était encore là. Il se frotta énergiquement les yeux mais elle continuait à le regarder ses bras grands ouverts comme pour l’accueillir en son sein. Elle l’appelait. « Harry ! Harry ! Harry, rejoins-moi… » Le garçon effrayé retourna en courant dans sa chambre pour prendre ses lunettes neuves. A son retour, la forme fantomatique avait disparu. Il soupira soulagé mais soudain la tête lui tourna, comme s’il venait de tourner en rond pendant des heures. Il vit le couloir se déformer, s’allonger, se tordre en tout sens comme si une distorsion de l’espace l’avait fait changer de dimension. Dans toute cette agitation, tremblant de peur, il attendit tout au fond de sa tête un petit ricanement qui semblait se moquer de lui. Il jeta ses lunettes au sol pour ne essayer d’effacer la vision de la transformation du couloir. Tout redevint normal autour de lui. Le cœur battant la chamade, il se précipita dans la salle de bain pour se passer un peu d’eau sur la figure. Il se regarda longuement dans le miroir pour essayer de comprendre ce qui s’était passé. Ne trouvant pas d’explication logique au phénomène auquel il venait d’assister, il se dirigea vers la chambre de sa mère et entra. - Maman ! Maman ! Réveille-toi ! La femme grommela avant d’ouvrir lentement les yeux. - Harry ? Qu’est-ce qu’il y a ? - Il y a… Il y a quelque chose de pas net dans le couloir. - Arrête ! Tu devrais retourner te coucher. Harry, les blagues de mauvais goût ne sont plus de ton âge. Il est tard et je suis fatiguée, laisse-moi. Dépité, le jeune garçon retourna dans sa chambre et alluma la lumière. Il s’assit sur son lit, la tête entre les mains et il se mit à réfléchir sur ce que venait de dire la voix. Mais où avait-il donc pu l’entendre ? Il n’avait plus du tout sommeil…
Au petit matin, il sortit dans le couloir mais rien ne se passa. Il n’y avait ni forme blanche, ni de ricanement. Aucun changement ne semblait avoir affecté la maison. Peut être n’était-ce que son imagination. Il se dit qu’il allait passer une journée normale mais raconta quand même ses mésaventures de la nuit à sa grande sœur qui ne rata pas l’occasion de se moquer de lui en le traitant de bébé et de trouillard. L’après-midi il alla faire du skate avec son meilleur ami, John mais ne lui raconta pas ce qui c’était passé chez lui. La journée passa rapidement sans incident notable et Harry oublia quelque peu ce qui lui était arrivé la nuit dernière. Sur le chemin du retour, il décida de passer par la rue qui se trouvait devant le nouveau théâtre. Arrivé à hauteur de celui-ci, alors qu’il roulait sur son skateboard avec John, il leva les yeux pour contempler l’édifice. Mais à ce moment même, sur l’un des derniers échafaudages de construction encore en place, il aperçut encore cette même forme blanche qui flottait à côté d’une des gargouilles de pierre avant de s’évaporer comme de la fumée dans le ciel. Bouleversé par ce qu’il venait de voir, il ne fit pas attention au poteau qui se trouvait juste devant lui et se le prit en pleine face, son skateboard roulant au loin… Il resta inconscient, allongé sur le bord de la route. Quand il revint à lui, John était à ses côtés et l’observait d’un air très inquiet. Harry se redressa sur un coude et tâta la bosse qu’il avait en plein milieu du front avant de demander : - Je suis resté inconscient longtemps ? - Non, juste trente secondes. Sinon ça va ? Tu… - Ouais ! Ouais ! Ca va ! C’est juste un petit mal de crâne mais ça va passer. , Reprit Harry. - Tu veux que je demande de l’aide ? , Dit John. - Non. Je t’ai dit que ça allait. - Ok, mais je vais quand même te raccompagner… Harry se releva et ramassa son skate avant de continuer à pied en direction de sa maison. Arrivé chez lui, le jeune garçon se précipita au premier étage pour prendre un bon bain. Il ne raconta rien à sa famille car il savait déjà qu’ils n’allaient pas le croire. Pendant qu’il était sous la douche, il ferma les yeux et réfléchit une nouvelle fois aux derniers évènements qui venaient de se produire. Pourquoi lui ? Que lui arrivait-il ? Qu’avait-il fait pour en arriver là ? Quels étaient donc cette silhouette fantomatique blanche, ce ricanement et cette voix ? Soudain une voix le tira de sa réflexion : « Harry ! Où es-tu ? Il faut que je te parle de quelque chose d’important ! » Il ouvrit brusquement les yeux et regarda autour de lui puis il reconnut enfin la voix de sa mère qui l’appelait et lui répondit : J’arrive m’an ! Je suis dans la salle de bain ! » Peu après, il descendit dans la salle de séjour et là une surprise de taille l’attendait : son père était de retour d’un long voyage à Istanbul et se tenait là devant lui, assis sur le fauteuil en cuir vert. Toute sa famille était réunie ! C’était tellement rare ! Il y avait sa mère et sa sœur assises toutes deux sur les fauteuils, son père et lui ! Monsieur Covert se leva et prit son enfant dans ses bras. - Tu vas bien, fils ? - Très bien papa ! , Répondit Harry. Ils s’assirent sur le canapé, il y avait beaucoup de papiers sur la table basse. Même les cendriers avaient été enlevés pour gagner de la place. Mais Harry remarqua surtout un gros dossier enveloppé d’une chemise rouge posé en plein milieu de la table. Le garçon avait reconnu l’emblème du théâtre que possédait son père. Il regarda son père chercher dans le tas de feuilles que contenait la grosse chemise rouge et l’homme en sortit un papier. Larry se retourna vers son fils, un sourire tendu sur les lèvres. Il resta silencieux quelques secondes avant de déclarer : - J’ai quelque chose de très important à vous communiquer. , Dit-il en dévisageant tour à tour chaque membre de la famille. - C’est quoi encore ? , Questionna Harry. - Et bien sois un peu patient mon fils ! Alors voilà : vous savez tous que le nouveau théâtre que j’ai fait construire nous a coûté une fortune. Nous avons presque tout dépensé pour le terminer. Mais, un grand industriel de la compagnie la plus importante d’Espagne me propose de le racheter le double que j’ai moi-même payé pour remette le bâtiment en état. Or, je n’ai pas fait construire un théâtre pour rien et je ne le revendrais pas pour l’instant donc il va falloir se serrer la ceinture pendant quelque temps. - Quoi ? , S’écria Harry surpris. - Tu as parfaitement compris, Harry. Plus de dépenses inutiles. , Répondit son père. - Et mon avis ne compte pas ? - Non. Tu es beaucoup trop jeune pour t’occuper de mon commerce. De plus je te trouve trop immature pour te confier une quelconque responsabilité à mon bureau. Il faut travailler dans la vie pour gagner de l’argent. - Dis plus tôt que tu te fous de nous ! Tu nous obliges à ne rien acheter pour ton enrichissement personnel ! , Cria Harry hors de lui. - Fils ! Ne parle pas à ton père sur ce ton ! , Intervint sa mère. - Harry ! Une fois que tu auras compris qu’il n’y a que l’argent qui compte pour réussir sa vie, on en reparlera. , Promit son père. Je pense que si nous gardons le théâtre, nous ferons plus de bénéfices que si nous le vendions ! - J’en n'ai rien à foutre de votre sale théâtre. Vous allez le garder ? Très bien ! Mais je suis sur que vous le regretterez ! Harry sortit en courant de la pièce et sortit dehors, le froid mordant de l’hiver lui piquant les joues. Il alla dans le jardin pour voir son chien, Crom. Il adorait jouer avec on chien. Ca le détendait et lui faisait oublier ses peines. Il lui lança la balle le plus loin possible et le gros chien noir alla la rattraper. Soudain tout se figea devant ses yeux. Le chien s’était arrêté en plein saut et restait dans les airs comme s’il volait. Le vent s’était arrêté mais les arbres restaient pliés comme si la pression était toujours là. C’est à ce moment là que le jeune garçon la vit : la forme blanche était apparue juste à côté de son chien, Crom. Elle s’avançait doucement vers le garçon, les bras grands ouverts pour lui souhaiter la bienvenue. Elle voulait le prendre avec elle. Elle voulait l’emmener. Il entendit à nouveaux cette voix qui semblait sortir des profondeurs de son être : « Harry ! Harry ! Viens, Harry. Viens avec moi ! Tu m’appartiens, Harry ! » Le jeune garçon tremblait de tous ses membres. Il aurait voulu s’enfuir mais ses jambes ne répondaient plus à l’appel. Il était totalement paralysé par la peur. Des gouttes de sueur coulèrent le long de son font et la forme s’approchait toujours, grandissant à chaque instant, l’enveloppant doucement. Harry ferma les yeux. Ses lunettes glissèrent de son nez et tombèrent sur le sol. Il se prépara à être aspiré par la forme. Il attendit. Soudain, il se sentit violemment poussé par terre. Il garda les yeux fermés et ne cria pas. Il attendit un instant. Un instant qui lui parut une éternité. Il se décida enfin à ouvrir les yeux. Il se retrouva allongé sur le trottoir, au bord de la route, son chien était juste au-dessus de sa tête, la gueule entrouverte avec la balle à l’intérieur. C’était le chien qu’il l’avait bousculé comprit-il. Il se redressa et regarda tout autour de lui. Il n’y avait absolument personne. Ce qui ne le rassura pas. Il entra en trombe dans la maison juste après avoir remis Crom dans le jardin et monta les marches de l’escalier quatre à quatre en direction de la chambre de ses parents. Il ouvrit grand la porte et trouva son père allongé sur lit. Il ne lui laissa pas le temps d’ouvrir la bouche et se précipita à côté de lui en retenant à grand peine ses larmes. - Papa, papa ! J’ai peur ! - Que t’arrive-t-il encore, fils ? , Demanda l’homme surpris de revoir l’enfant quelques minutes seulement après leur dispute. - Je… Je ne sais pas. Je jouait dehors avec Crom quand il y a eu… Une… Une lumière blanche qui venait sur moi ! Tout c’est arrêté mais le chien. On aurait dit que le temps… Le temps c’était arrêté ! Larry regarda son fils comme s’il s’agissait d’un étranger. Il fit les gros yeux avant de répondre : - Arrête de dire des sottises ! J’ai fait un long voyage et je suis très fatigué ! Laisse-moi me reposer un peu au lieu de m’embêter avec des histoires à dormir debout ! - Mais ! Il y avait un truc dans le jardin ! Je te jure que je ne te mens pas ! , Dit Harry en désespoir de cause. - Regarde par la fenêtre et dis-moi ce que tu vois, Harry. Le jeune garçon fit ce que lui avait demandé son père. Evidemment il n’y avait rien puisque la forme blanche avait disparu. - Alors ? Que vois-tu ? , Lui demanda son père. - Rien… papa… - Alors ? Tu vois bien que ce n’est pas la peine de me déranger pour rien ! Tout à l’heure je disais que tu étais immature, en voilà la preuve ! - Mais… Je te jure que c’est vrai ! - Ca suffit comme ça ! Je sais que c’est dur, que tu es perturbé depuis ton accident mais ne raconte pas de bêtises. Tu as besoin de te reposer, fils. C’est ce que le médecin n’arrête pas de me dire. Alors à partir de maintenant tu n’as plus le droit de sortir dehors pour faire de la planche à roulette avec tes copains ! - Mais…, Commença le jeune garçon dépité. - Il n’y a pas de mais ! File immédiatement dans ta chambre. Harry sortit de la chambre tête baissée. Il était déçu que son père ne le croie pas non plus. Personne ne le croyait. Il n’en avait pas parlé à John, son meilleur ami car il le prendrait pour un fou ayant un peu trop fumé des gaz hallucinogènes. Il marcha lentement jusqu’à sa chambre et entra. Puis, il s’allongea sur son lit, les yeux grands ouverts, regardant fixement le plafond tout blanc. Son père devait avoir raison. C’était à cause de son accident, le jour où il avait failli y rester. Il fallait qu’il se remette du choc émotionnel et cela prenait du temps. Son père avait raison ! Il avait toujours raison d’ailleurs. Il resta là sans bouger pendant au moins deux heures. Il essayait d’oublier, de se remettre encore une fois les idées en place, de se persuader que son père avait raison. Il était immobile comme un cadavre que l’on prépare pour faire une autopsie. Il s’aperçut alors que son cœur battait la chamade. Il se redressa sur un coude et il l’entendit. La voix. Ses cheveux se dressèrent sur sa tête. Elle lui murmurait à l’oreille : « Viens ! Harry ! Rejoins-moi ! » C’était cette même voix qu’il avait déjà entendu mais dont il ne se souvenait plus où. Il se leva précipitamment et regarda par la fenêtre. Immobile ! Tout était immobile ! Les oiseaux restaient figés dans le ciel gris nuageux, une maman qui promenait son bébé était en plein milieu de la route comme pour traverser mais ne bougeait plus, les bruits du vent avaient cessé. Quand il se retourna, elle était là aussi. La forme blanche flottait pour le prendre, cette forme féminine, les bras grands ouverts avec la même robe blanche en lambeaux qui pendait comme des rubans lumineux. Elle n’avait pas de visage. Il ferma les yeux se sentant aspiré encore une fois par la créature surhumaine. « Viens ! Rejoins-moi ! Tu verras nous serons bien ensemble ! » Il rouvrit les yeux. Non ! Il ne voulait pas venir ! Il se précipita vers la porte juste à côté de lui et l’ouvrit d’un geste brusque et s’arrêta net. Le couloir recommençait à s’allonger, s’allonger, s’allonger… Bientôt le jeune garçon ne put en voir le bout, il semblait infini. Il referma la porte et la rouvrit à nouveau. Rien n’avait changé, le couloir était toujours distordu comme attiré par un gigantesque aimant invisible. Il tremblait de tous ses membres, ses dents claquaient en cadence et il sentit ses jambes flageoler sous son poids. Derrière lui, la "femme" s’approchait lentement. Il cria : « NOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOON ! » Et tout devint noir. | |
| | | PéZède Démoni N00b
Nombre de messages : 166 Statut : Membre Mini-Lordien Date d'inscription : 21/06/2005
| Sujet: Re: [Général] VOX Mar 21 Juin à 12:17 | |
| Chapitre 3 : La Voix
« Harry ! Harry ! Harry, ouvre les yeux ! » La voix semblait tellement lointaine. Le jeune garçon ne bougea pas, perdu dans un océan de vide. - Harry ! Ouvre les yeux bon sang ! Le jeune garçon ouvrit lentement les yeux en même temps qu’il reprenait ses esprits. - Harry ! Qu’est-ce qu’il t’arrive encore ? , Lui demanda son père inquiet. L’enfant ne répondit pas mais serra très fort son père dans ses bras. - Harry ! Ca va ? Qu’est-ce qu’il c’est passé ? Harry réponds-moi ! Ca fait à peine cinq minutes que je t’ai dit d’aller te reposer et… - Cinq minutes ?! , S’exclama enfin le garçon. - Quoi cinq minutes ? Tu viens à peine de sortir de ma chambre et je te retrouve par terre devant le couloir et inconscient ! - Mais… C’est impossible ! Comment ? Ca fait au moins trois heures que je suis dans ma chambre ! , Bafouilla le jeune garçon ne comprenant plus rien. - Je t’ai dis d’arrêter avec tes conneries ! , S’énerva monsieur Covert. Harry ne répondit pas. Ce n’était pas la peine. Son père ne le croirait jamais. Il regarda par la fenêtre, tout était redevenu normal, les oiseaux voletaient de nouveaux gaiement dans le ciel. Son père secoua la tête de désespoir et sortit de la chambrette. Harry, lui se hissa jusqu’à son lit et s’endormit profondément. Quand il se réveilla vers cinq heures du soir, il se sentit las. Il devait en finir rapidement. Il devait prouver à ses parents qu’il avait des visions réelles et pas folklorique comme son père le pensait. Il devait rassembler des preuves et quel était le meilleur endroit pour en trouver ? Le nouveau théâtre ! Là où tout avait commencé et où tout devait finir !
La nuit commençait à tomber quand il arriva devant le théâtre. Aujourd’hui il n’y avait aucune représentation. Par conséquent, les ruelles aux alentours étaient presque vides. Seul quelques badauds restaient encore dans les rues. Il émanait du théâtre une étrange énergie… Harry était attiré par cet endroit. « Comme le chant des sirènes » pensa-t-il. Il ne pouvait résister à l’envie de pousser la porte. Il devait rentrer, il devait pousser la porte. Tout l’univers se réduisit à la grosse porte, juste pousser la porte. Un simple geste et il pousserait la porte. Ni tenant plus, il poussa. A l’intérieur tout était sombre. Il alluma une lampe torche qu’il avait pris chez lui et balaya le hall d’entrée du rayon lumineux. Il avança prudemment, ses pas raisonnant dans les couloirs comme une voix qui l’appelait. La voix… Toujours la même. Elle s’était insinuée dans sa tête depuis le début, depuis son accident. Oui, c’était le jour de son accident qu’il l’avait entendue pour la première fois. Elle semblait l’appeler. L’appeler vers un autre monde, toujours plus séduisante, toujours plus forte. Elle était là, tapis au fond de son cerveau et lui murmurait dans le moindre recoin de ses entrailles, résonnant dans tout son corps et dans toute la pièce comme s’il s’agissait d’un cœur battant au même rythme que les paroles de cette horrible voix : « Viens ! Viens me rejoindre ! Tu ne t’échapperas pas ! Non pas cette fois ! » Elle attendait son heure. Elle voulait qu’il vienne. Il lui avait déjà échappé une fois. Elle ne le laisserait pas recommencer et elle savait qu’il le savait… Comme la première fois, une forme blanche brilla devant ses yeux. Ce n’était pas possible ! Elle ne pouvait pas être réelle ! Soudain des images affluèrent devant les yeux de Harry. D’abord il ne distingua pas grand chose. Seulement des lambeaux d’images. Mais à chaque fois la même couleur revenait : le rouge ! Il résista tant qu’il put, il voulait arracher les images de sa tête, des images où il se voyait gisant dans un bain de sang. Ca ne pouvait pas être vrai ! Il était vivant. Il lutta de toutes ses forces mais la voix tout au fond de son cerveau semblait se moquer de lui : « Vas-y ! Essaye de me résister ! Oui pauvre mortel, bats-toi tant que tu le peux, car bientôt tu m’appartiendras ! » Harry lâcha sa lampe, s’adossa une colonne de pierre qui ornait la salle et porta ses mains à ses oreilles comme pour étouffer la voix qui le torturait. Il ne voulait plus jamais attendre cette voix, cette horrible voix ! Mais la voix continua, les images aussi s’enchaînant à un rythme insoutenable. Maintenant il ne voyait plus que les images dansant devant ses yeux et la voix horrible qui lui chuchotait à l’oreille : « Regarde celle-ci, j’ai voulu t’électrocuter un jour, dans ta baignoire ! Et c’est ton père qui t’aurait tué en laissant tomber son rasoir électrique dans le bain. Ou bien, regarde ça : j’ai rêvé de te tuer quand tu étais devant le théâtre ! Une corde aurait pu se casser et la poutre qu’elle soutenait te serait tombée dessus ! Amusant non ? Il ne serait resté que de la bouillie de toi ! » Le jeune garçon fut secoué de sanglots. Pourquoi lui ? Pourquoi ne le laissait-t-elle pas tranquille ? Elle avait échoué une fois alors pourquoi restait-elle à rôder autour de lui comme le vautour qu’elle était ? Pourquoi s’acharnait-elle à le faire souffrir, à le torturer ? S’insinuant partout, dans les moindres recoins de son cerveau elle lui répondit : « Tu veux savoir pourquoi ? Oh ! Mais tu le sais déjà ! Tu m’as échappé ! J’avais décidé de te faire mourir ce jour là, pour de bon. Mais tu as survécu ! Tu as survécu ! Oui, tu es mort pendant quelques secondes, pendant quelques secondes TU m’as appartenu ! Et puis ces fichus toubibs t’ont ramené vers le monde des mortels ! Tu m’appartiens ! Tu entends ? Tu es à moi ! Mais on t’a enlevé, mon enfant ! On t’a volé ta mort ! Pire, on t’a volé à moi ! Mais je vais te récupérer ! Oh, que oui ! Prépare-toi à me rejoindre de nouveau. Ce qui m’appartient, je le garde ! » A bout de souffle, terrorisé par les images de morts et de douleurs le jeune garçon se traîna misérablement à travers toute la salle. Il devait partir. Trouver un moyen de s’échapper. Pourtant, plus il s’éloignait plus elle devenait forte. Il devait trouver un moyen de s’en débarrasser pour toujours et pourtant elle ne cessait de lui répéter à tue-tête : « Tu m’appartiens, tu m’appartiens, tu m’appartiens, tu m’appartiens... » Harry se retrouva devant une porte. Se hissant grâce au mur, il parvint à se remettre debout. Sa vision se troublait, le sol sembla bouger sous ses pieds. « Mais que t’arrive-t-il ? Tu es malade ? Tu vas mourir ? Mourir ! Mourir ! Mourir ! Ce mot te fait peur, hein ? Tu sais, au bout de quelques années on s’habitue. J’en ai hanté des personnes avant toi ! Certaines n’ont pas tenu deux jours, d’autres, plus coriaces, ont résisté plus longtemps. Mais toi aujourd’hui tu vas mourir ! Mourir ! Mourir ! Mourir ! Laisse-toi faire. Au fond je sais que tu en as envie ! Tu vas mourir ! Mourir ! Mourir ! Mourir ! » « ASSEZ ! » Cria le garçon. Tremblant de tous ses membres, des gouttes de sueur coulant sur son front, les jambes horriblement douloureuses et au bord de la nausée il hurla. Il hurla d’un cri bestial, presque inhumain. Pendant un bref instant il était devenu une bête. Un animal qu’on avait longtemps traqué et auquel on venait de donner le coup de grâce. Longtemps le cri raisonna dans le hall, déchirant la nuit qui était tombée sur la ville qu’il avait habitée depuis sa naissance. Sa ville et sa dernière nuit. Il n’y avait qu’un seul moyen d’en finir. D’en finir avec cette voix. Cette voix qui raisonnait dans sa tête. D’une main tremblante il tourna la poignée de la porte et entra en titubant. Dans le brouillard qui enveloppait ses yeux il distingua des sièges. Il était entré dans la salle de théâtre, plus précisément sur le balcon juste devant la scène. La hauteur qui le séparait de la scène lui donna encore envie de vomir. Affaibli, il tomba sur un siège, un bras de chaque côté agrippé à l’accoudoir. Il serra tellement fort que les jointures de ses mains blanchirent et ses ongles pénétrèrent dans la couverture rouge sang qui recouvrait le siège du spectateur. La voix continuait toujours à lui susurrer d’horribles choses : « Alors, je crois qu’on va passer un petit bout de temps ensemble avant que tu te décides à… Oh ! Mais que je suis bête ! Si tu le fais, tu seras toujours avec moi ! Allez, n’aies pas peur. Bientôt tout sera fini et tu pourras enfin te reposer. Tu n’as pas le choix ! Tu n’as pas le choix ! Meurs ! Allez viens me rejoindre ! Tu en meurs d’envie ! » De longues minutes passèrent, Harry resta figé comme une statue, comme suspendu entre deux réalités, ne sachant pas laquelle choisir. Il finit par dire comme à lui-même, sa voix se répercutant dans le théâtre vide : « laissez-moi ! Je ne veux plus vous entendre ! Je veux redevenir comme avant : normal ! Laissez-moi… » Mais il savait qu’il était trop tard. La voix s’était tue. Elle attendait, elle savait qu’il n’y en avait plus pour longtemps. « Oui. » Pensa le jeune garçon, « tout sera bientôt fini. » Il avait franchi la limite. La salle ne lui faisait plus peur. Il se leva comme hypnotisé par une flûte enchanteresse, les yeux rivés droit devant eux, la bouche entrouverte, les pieds avançant toujours plus près du bord du balcon. Il pensa à sa famille, à son père qui n’avait jamais voulu le croire, le père qu’il avait toujours secrètement admiré. Le père archéologue qui avait toujours réponse à tout, sauf à cette question que son esprit logique ne pouvait comprendre : quelle est cette voix ? Le jour allait bientôt se lever. La grande salle de théâtre fut soudainement baignée d’une lumière hésitante. Puis, un rayon passa par une lucarne frappant le milieu de la scène. Il comprit que l’heure était venue. Il allait le faire. Il était redevenu l’enfant qu’il avait été avant l’accident. L’accident qui lui avait coûté la vie. Il s’approcha de la rambarde du balcon. Il regarda en bas. Environ sept mètres le séparaient de cette scène, le rayon l’attirait. C’était la voix, la vraie voie. Elle lui disait : « Viens ! Viens ! Allez, viens ! » Il enjamba la balustrade, se retenant par les mains aux barreaux de fer. Son œil plongea dans l’infinie et le néant. « Viens ! Viens ! Viens ! Tu vas mourir ! Mourir ! Mourir ! Mourir ! C’est l’heure. Bientôt tu pourras te reposer. Un tout petit effort. Oui, c’est bien. Allez, saute ! » Un à un ses doigts se décrispèrent, il plongea vers la lumière, vers la voix, vers la voie…[/i] | |
| | | PéZède Démoni N00b
Nombre de messages : 166 Statut : Membre Mini-Lordien Date d'inscription : 21/06/2005
| Sujet: Re: [Général] VOX Mar 21 Juin à 12:18 | |
| A chacun son tour [Epilogue]
Larry n’avait pas vu son fils rentrer à la maison ce soir là. Il s’était dit : « Ah ! Il doit encore être allé chez un copain et il a encore trop bu pour arriver à rentrer tout seul. Il rentrera probablement avec son ami le saoulard tard dans la nuit, enfin, tant qu’il ne s’agit pas de trafics clandestins... Mais il aurait quand même pu me prévenir ! Une bonne correction lui ferait du bien. » Larry s’était alors couché sur cette pensée et rien ne put le réveiller cette nuit là et même le réveil ne le fit sortir de son lourd sommeil qu’après avoir sonné pendant une demi-heure. Il abattit violemment son poing sur le réveil qui cessa de sonner dans un dernier couinement de ressorts cassés. L’archéologue se leva de son lit. Il était dix heures du matin, sa femme devait être partie depuis plus de deux heures. Il marcha comme un somnambule jusqu’au salon où il alluma la télé. Il se gratta le menton, la barbe naissante le démangeait puis, il s’installa dans un grand fauteuil. La télécommande en main, il mit la chaîne du journal. La présentatrice venait juste de finir d’énoncer le sommaire et le premier reportage sur une ancienne mine désaffectée commençait. Soupirant, l’homme n’osa pas changer de chaîne. Il ne pouvait pas, comme enchaîné au fauteuil où il était assis. La télécommande reposait à quelques centimètres de ses doigts mais une force inconnue l’empêchait de bouger le moindre petit muscle. Un malaise s’empara soudain de lui, la fatigue c’était presque évaporée et il voulait boire son café pour finir de se réveiller complètement. Il voulut se lever mais resta assis, les yeux rivés sur la télévision. Le reportage sur la mine venait de s’achever et la présentatrice annonçait maintenant qu’un accident avait eu lieu dans la ville de C*** dans une des ruelles proches du nouveau théâtre. On y avait retrouvé le corps d’un jeune homme mort d’une étrange façon. La présentatrice continua : « En effet, selon les experts le corps n’a pas été écrasé par une voiture et l’individu n’est pas non plus mort de froid. Il semblerait qu’il ait simplement fait une chute d’une dizaine de mètres avant de s’écraser. Malgré l’enquête menée dans le voisinage, la police n’a pas encore trouvé une quelconque raison à l’accident. Nous n’avons pas encore identifié le corps car les empruntes digitales au bout des doigts semblent avoir disparues. Il n’y a pourtant aucun signe de brûlure ou de violence sur le mort. Si vous connaissez cet enfant, contactez le service d’urgence. » Une photo apparue alors à l’écran. Larry écarquilla les yeux. « HARRY ! HARRY, VIENS VOIR ! VIENS ICI IMMEDIATEMENT ! » Pas de réponse. C’était pourtant samedi. Il n’avait pas cours aujourd’hui et il était trop tôt pour que le garçon soit déjà levé. L’archéologue aurait voulu se lever mais il ne pouvait pas, toujours retenu par une écrasante puissance. Il reporta son regard vers l’écran. La bouche entrouverte dans un rictus d’horreur, les yeux dilatés, les mains tremblantes. La journaliste se remit à parler : « Le corps a été retrouvé dans la rue du Général ***. Nous suivrons cette enquête de près dans les prochaines heures. Bien, passons à… » Larry n’entendait plus. Les yeux fixes, l’homme était perdu dans un monde qui venait de s’écrouler. La rue du Général *** ! C’était exactement l’endroit où Harry, son fils avait failli mourir dans un accident de voiture ! « Dring ! Dring ! Dring ! » Son fils venait de mourir ! Il avait pourtant cherché à attirer son attention avec des histoires à dormir debout et son père, lui-même, ne l’avait pas écouté. Il n’avait pas ressenti l’appel de son fils. « Dring ! Dring ! Dring ! » Pourquoi ? Pourquoi ne l’avait-il pas écouté ? Pourquoi n’avait-il pas passé plus de temps avec lui comme quand il l’emmenait à la pêche des années plus tôt ? « Dring ! Dring ! Dring ! » Son fils était mort ! Il avait échoué en tant que père. Echoué sur toute la ligne, depuis le début. Il n’avait pas été un bon père. Il avait échoué, il était un raté, un père raté. Des gouttes perlèrent de ses yeux. Il ne chercha pas à les essuyer. Il avait échoué. « Dring ! Dring ! Dring ! » Mais quel était ce bruit ? Le téléphone ! « Dring ! Dring ! Dring ! » Il se leva. Pourtant il n’en avait plus envie. Il voulait rester assis et attendre. Attendre que son fils rentre à la maison. Mais il se leva, comme manipulé par une volonté autre que la sienne. Il essaya de résister mais il était inexorablement attiré vers le meuble où reposait le téléphone. Il tendit sa main vers le téléphone. « Dring ! Dring ! Dring ! » Ses doigts se posèrent sur le combiné et lentement il emmena l’appareil pour le coller à son oreille. Il avait soudain très peur. Toute sa tristesse s’était évaporée, le silence était revenu dans la pièce. Seuls les mots qui avaient retenti dans le combiné du téléphone semblaient faire écho dans toute la maison, dans toute la ville, dans tout le pays, partout. Les quatre mots fatidiques venaient d’être prononcés : « Maintenant, c’est ton tour ! »
FIN | |
| | | Contenu sponsorisé
| Sujet: Re: [Général] VOX | |
| |
| | | | [Général] VOX | |
|
Sujets similaires | |
|
Sujets similaires | |
| |
| Permission de ce forum: | Vous ne pouvez pas répondre aux sujets dans ce forum
| |
| |
| |